Arnaud Lacaze-Masmonteil

Enseignant à Gobelins, l’école de l’image, responsable du ProLAB

J’appartiens à la génération qui a vécu en direct la révolution de l’informatique personnelle. Elle m’a permis de lancer, encore étudiant, des projets de journaux que la PAO rendait accessible, puis de concevoir des ouvrages multimédias associant textes, images, sons, vidéos… C’était révolutionnaire à la fin des années quatre-vingts ! J’ai fondé en 1993 une société d’édition multimédia, pour réaliser et commercialiser des CD-Rom portant sur l’histoire contemporaine et les relations internationales.

En parallèle, j’ai commencé à intervenir de façon régulière à Gobelins, l’école de l’image et à participer au développement du département multimédia de l’école. Pendant vingt ans, j’ai ainsi conduit ces deux activités simultanément, ce qui m’a permis de suivre de près et de participer aux bouleversements successifs du secteur interactif : le web, évidemment, puis l’arrivée du mobile, des plateformes, des réseaux sociaux, des objets connectés…

Il y a trois ans, j’ai rejoint Gobelins comme enseignant permanent. Gobelins, l’école de l’image, est l’une des vingt-quatre écoles de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris Ile-de-France. Elle est aujourd’hui l’école de référence de la création de l’image (fixe ou animée, du print au web), de sa conception à sa production. Elle forme chaque année près de huit cent élèves et apprenti·es (du Bac Pro à Bac+5) et mille neuf cent stagiaires en formation continue, dans les domaines de la photographie, du design interactif, du design graphique, du cinéma d’animation, de la communication imprimée et plurimédia (pré-presse, impression, PLV) et du jeu vidéo.

La démarche pédagogique de l’école est fondée sur la pédagogie par projets. La plupart des formations sont structurées autour d’exercices et de workshops qui permettent aux apprenant·es de confronter concrètement et instantanément les compétences qu’ils/elles acquièrent avec une mise en situation aussi proche que possible des réalités de la « vraie vie ». Cette proximité avec le monde professionnel est une caractéristique très forte de Gobelins : nous sommes ainsi convaincu·es de la pertinence de la formation en alternance (apprentissage ou contrats pro), et nos intervenant·es sont pour l’essentiel des professionnel·les qui viennent transmettre aux élèves et stagiaires des compétences en phase avec les pratiques du monde de l’entreprise. C’est grâce à cette approche que nos formations ont une excellente réputation, et que nous obtenons des taux de placement remarquables pour nos jeunes diplômé·es.

Je suis responsable à l’école d’un dispositif baptisé ProLAB, dont l’objectif est de renforcer encore la professionnalisation de nos élèves. Dans ce cadre, j’anime ainsi la Coopérative de projets, dont la vocation est de développer des partenariats pédagogiques avec des institutions, des associations et des entreprises, pour fournir aux équipes pédagogiques des projets riches et intéressants. Par exemple, dans le cadre de leur atelier « Affiches », nos concepteur·rices graphistes vont travailler pour un évènement organisé par une association culturelle ; ils/elles doivent prendre en compte les différentes contraintes exprimées par leur commanditaire, qui va participer au jury de restitution et donner un point de vue complémentaire à celui des enseignant·es. Autre exemple, dans le cadre de leur « projet agence », nos élèves UX designer·uses et directeur·rices de projets digitaux doivent répondre à des problématiques de stratégie digitale réelles, proposées par des partenaires extérieur·es.

La coopérative permet aussi aux élèves de travailler sur des projets expérimentaux prestigieux, comme du video-mapping avec le musée Picasso, la conception de dispositifs interactifs avec le Musée du Louvre, de prototypes de datavisualisation avec la SNCF…
Précisons que ces différentes réalisations sont des projets pédagogiques, sans obligation de résultat ; nous sommes très attentif·ves à ne pas entrer en concurrence avec le monde des agences et des studios !

Au sein du ProLAB, je m’occupe également de notre Accélérateur de projets : au sein de notre filière Design interactif, qui a la caractéristique d’accueillir des profils designers et développeurs qui vont travailler ensemble sur les différents exercices du cursus, nous voyons émerger des prototypes de services interactifs, de jeux, de dispositifs, qui sont souvent très innovants et très pertinents. L’ambition de l’Accélérateur est de permettre aux équipes porteuses de ces projets, si elles le souhaitent, de les poursuivre au-delà du jury, et de passer de l’étape de prototype à celle de produit finalisé. Cela implique par exemple un accompagnement sur les aspects technologiques, une réflexion plus avancée sur le modèle économique et la stratégie de lancement ou de monétisation du projet, la mise en relation avec des partenaires pertinent·es… L’accélérateur a ainsi accompagné une vingtaine de projets depuis sa création.

Je pilote également un autre dispositif intéressant, les « Jeudis Créatifs » : nos élèves ne sont pas en cours le jeudi après-midi, mais nous leur proposons toute une palette d’activités destinées à enrichir leur créativité : expositions, conférences, ateliers de dessin ou de conversation en anglais, présentations de technologies innovantes… Les élèves qui le souhaitent peuvent aussi participer à des projets créatifs, souvent orientés sur du bénévolat de compétence : réalisation de clips ou de supports de communication pour des associations humanitaires, projets culturels… Ces activités sont menées de façon volontaire et autonome par les élèves, qui enrichissent leur expérience, ainsi que leur book !

L’ambition d’une école comme Gobelins n’est pas seulement de former ses apprenant·es aux outils et aux méthodologies de production des industries créatives de l’image ; elle est également de leur apporter des compétences transversales : travail en équipe interdisciplinaire et multiculturelle, expérimentation, initiative et responsabilité, capacité d’adaptation dans des environnements technologiques et économiques très évolutifs… Ces différents dispositifs contribuent à développer ces compétences, et à enrichir encore l’intensité et l’efficacité de l’expérience pédagogique de nos élèves.

Témoignage publié dans le guide des formations 2016.